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Chapitre 32 - La fin d'un règne

Cendre et la Vallée Oubliée


Cendre avait trouvé Vlad, assis seul dans son salon, comme à son habitude. Pauvre vieux vampire solitaire...

Elle savait que, cette nuit, aucune personne de la milice ne serait dans les parages car Francis lui avait promis de rappeler discrètement ses hommes.

Ce serait donc elle contre le Comte, seuls sans personne, et elle se battrait jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’un.


Mais avant d’en arriver là, elle devait absolument savoir où était Lucas, et elle comptait sur le bon sens de Vladislaus pour le lui dire.

- Bonsoir, Monsieur le Comte. Je crois que nous avons une conversation à terminer...

- Je ne vous dirai rien de plus sur le Duc de Riverview, si c’est pour cela que vous êtes ici.


- Alors, c’est moi qui vais vous en parler. Vous avez enterré le Duc quelque part dans la Vallée, le Duc, votre ami, vous vous rappelez ? Dites-moi où il se trouve.


- J’ai l’impression que votre visite n’est pas une simple visite de courtoisie, Madame Valrose... Votre ton est très déplaisant.


Le Comte avait instantanément revêtu sa forme sombre.

- Je ne vous dirai rien, entendez-vous ! Il s’agit d’une affaire entre le Duc et moi. Elle ne vous concerne aucunement.


- Oh mais si, elle me concerne ! Le Duc est mon Unique. N’imaginez pas une seconde que je vais le laisser moisir une nuit de plus sous terre. Je vous repose donc ma question : où est-il ?


Le Comte était allé s’asseoir et avait prié Cendre de faire de même.

- Vous aussi m’avez trahi... J’avais mis ma confiance en vous et vous avez pris un amant alors que vous m’étiez promise...


- Un amant ? Vous me sous-estimez, Monsieur le Comte. Je n’ai pas eu un amant mais plusieurs, et vous le savez très bien puisqu’ils ont servi à ma descendance.

- Il n’y a rien de comparable. Ces géniteurs ne sont que des humains sans grand intérêt, ni pour vous, ni pour moi. Vous voulez savoir ce qui est arrivé au Duc ? Je vais vous le dire...


- Mon ami Lestat est venu une nuit me raconter combien il vous aimait. Il m’a fallu écouter ses palabres un moment et surtout supporter cette tristesse qu’il avait de m’avoir trahi. Oh, je savais qu’il vous aimait, j’ai pu le constater de mes yeux dans les catacombes.


Mais qu’il vienne m’en parler avec autant de franchise a été une grossière erreur, car si j’avais un doute quant à la réciprocité de cette coquetterie, je n’eus ensuite que des certitudes.


Sa visite était destinée à m’égarer quant à votre propre implication, et je le lui ai fait gentiment remarquer.


Etant officiellement au courant de votre situation libertine, nous savions tous les deux que je ne pourrais décemment plus laisser l’outrage impuni. Le Duc en était pleinement conscient.

Il me laissa donc décider du châtiment que je jugerais acceptable pour réparer votre offense commune, mais sous condition tout de même que vous ne subiriez aucun courroux de ma part, condition que j’ai acceptée, bien sûr, dans ma toute bonté.

Je devais bien cela à un homme qui fut mon ami durant plusieurs siècles et qui n’éprouvait aucune peur, je dois bien le reconnaître.


Je lui ai toutefois demandé quel degré d’amour il y avait entre vous et, lorsqu’il m’a révélé que vous étiez Uniques l’un pour l’autre, j’ai estimé que la sanction devrait être exceptionnelle. Il le savait...


Les vampires savent tous que les Uniques ont ce don de pouvoir communiquer entre eux et je me refusais de laisser arriver une telle chose. Vous deviez vous concentrer sur votre destin. Et vous y êtes magnifiquement parvenue.


Je pris donc la douloureuse décision d’enterrer mon ami et lui demandai de faire venir sa servante-sorcière afin qu’elle lui jette un sort l’empêchant de communiquer avec vous.


- Le Duc a accepté son malheur avec une grande fierté et beaucoup de distinction. Je lui ai promis que l’affront serait lavé le jour où je le libèrerai.


- Et quand avez-vous donc prévu de le libérer ?

Le Comte parla plus fort :

- Quand, à votre avis ?! Lorsque nous serons mariés et que les portes de la Vallée seront ouvertes, bien sûr ! Avez-vous oublié votre destinée ?


- Mais vous êtes complètement fou ! Si vous ne le libérez pas cette nuit, je ne vous épouserai pas, Vlad ! C’est tout ce que vous aurez obtenu ! Et votre Vallée restera fermée à jamais !


- Je vous ferai brûler en place publique, vous le savez très bien.


- Sincèrement, vous croyez que je suis encore la jeune fille apeurée qui est arrivée dans votre manoir il y a vingt-huit ans ? Vous croyez que je n’ai rien appris ? Cessez de vous imaginer que je suis candide, vous m’insultez. Je ne brûlerai pas en place publique. Et si vous avez besoin de moi pour ouvrir les portes de la Vallée, moi, je n’ai pas besoin de vous.


- Et vous feriez comment, jeune Dame ? Le destin de la Vallée est lié à son couple de Grands Maîtres.

- Lucas... Le Duc Lestat de Riverview... Lui aussi est un Grand Maître.


- Je vous interdis de dire une chose pareille ! Cette Vallée est à moi ! A moi et à moi seul !


- Alors, dites-moi où il est, et je vous épouserai comme prévu.

Cendre n’en pensait pas un mot mais sa patience avait été péniblement mise à l’épreuve, et elle voulait amener Vlad à céder.


- Pauvre enfant ! Mais vous n’avez donc pas compris que votre destin est avec moi ! Vous ne saurez jamais où est le Duc. Je préfèrerais mourir.

- Très bien ! Dans ce cas, je vous défie dans un combat à mort.


Ils s’étaient alors levés tous les deux. Leurs regards s’affrontèrent, plein de haine, durant plusieurs minutes interminables. Aucun des deux ne cèderait.

- Alors, ça va finir comme ça ? lui avait dit le Comte.

- Il le faut. Ce sera vous ou moi.


Ils savaient tous les deux que la nuit allait être très brève, ou très longue... mais l’un d’entre eux n’y survivrait pas.

- Un combat à la loyale, n’est-ce-pas, Monsieur le Comte ?

- Je ne l’envisageai pas autrement, Madame Valrose.


Ils avaient pris place, l’un en face de l’autre, prêts à s’affronter.


Le Comte avait bien essayé de faire entendre raison à sa jeune descendante, lui faisant remarquer qu’elle ne ferait pas le poids contre lui, mais Cendre clama qu’il avait tort de croire qu’elle ne serait pas à la hauteur.


Pourtant, lorsque l’affrontement commença, Cendre eut beaucoup de mal à parer les coups de Vladislaus. Elle s’en sortait mais elle était loin d’avoir réellement le dessus sur lui.


Il jouait avec elle comme avec une poupée.

- Allez, Madame Valrose ! Vous êtes capable de bien meilleur que cela, non ? Oubliez vos sentiments et battez-vous comme un vampire !

Elle réalisa alors que le Comte avait raison. Oui, elle le haïssait, oui elle lui en voulait, mais quelque part, elle avait encore le souvenir de ces instants qu’ils avaient passés ensemble autrefois, des souvenirs qui l’empêchaient d’utiliser complètement sa force brute contre son vieil ami.


Elle se rappela alors pourquoi elle était là, pour Lucas, parce que le Comte l’avait enterré sans pitié, aucune, l’abandonnant à son sort depuis cinq ans déjà. Il n’avait eu aucune commisération pour son ami, lui. Il l’avait juste jeté aux oubliettes et elle le haïssait tellement pour cela !

Le duel prit alors une autre tournure...


Elle se jeta sur le Comte, sans état d’âme cette fois, bien décidée à en finir rapidement avec lui. Il n’était pas question qu’il s’en sorte et elle devait rester en vie pour sortir Lucas de son tombeau de terre.



Et elle vainquit le Comte. Sa victoire n’eut rien d’héroïque ni de prestigieux. Elle avait un goût amer et douloureux, le goût de la trahison. En tuant Vlad, elle prenait sa place et devenait, de par la loi des vampires, Grande Maîtresse Vampire.


- Vous êtes un idiot. Vous auriez dû me dire où se trouvait Lucas... Vous saviez comment tout cela allait finir.

Il le savait. Il l’avait provoquée car il voulait en finir dignement et ne pas avoir à subir une opprobre publique lorsque son peuple découvrirait que sa promise l’avait abandonné.


Elle le serra un instant contre elle. Elle avait vaincu, certes, mais tout cela avait commencé par leur trahison à Lucas et à elle, une trahison qu’il leur avait été impossible d’éviter mais qu’elle ne regrettait pas. Seul l’effet papillon était bien regrettable...


Cendre entreprit de reposer le corps du Comte délicatement sur le sol. La Faucheuse n’allait pas tarder et elle ne souhaitait pas la croiser. Elle reviendrait chercher son urne plus tard.


Caleb, Lilith, Francis et Diego l’attendait à la sortie du manoir. Ils avaient senti, comme tous les vampires de la Vallée, qu’un Grand Maître s’était éteint et avait laissé sa place à un autre. Un autre règne allait commencer.

Cendre demanda à Caleb d’aller chercher l’urne du Comte et de la ramener à la chapelle. Elle statua que les trois autres iraient dans les catacombes pour informer la population que Cendre Valrose était à présent souveraine de la Vallée.


Lorsqu’elle eut prévenu les enfants, elle s’occupa, avec Caleb de donner une sépulture décente à celui qui avait été autrefois son ami. Ils l’enterrèrent dignement dans le jardin de la chapelle puis Cendre s’isola dans sa crypte, laissant son ami et sa femme préparer les enfants à ce que serait la cérémonie du lendemain.


 

Le décorum des Grands Maîtres eut lieu la nuit suivante. Cendre fut reconnue par ses pairs, Grande Maîtresse Vampire et fut couronnée souveraine de la Vallée. Un représentant de chaque famille de Forgotten Hollow avait été invité et tous avaient répondu présents.


Elle était entourée de ses enfants et elle avait elle-même présenté, à son peuple, ses héritiers qui furent acclamés vivement et chaleureusement.


Les enfants n’étaient pas peu fiers. Samuel et Isaure portaient la couronne des héritiers, et Blanche et Clotaire, bien qu’étant encore trop jeunes pour avoir cet honneur, se rendaient bien compte qu’ils étaient les petits « rois » de la cérémonie.


Lorsque le cérémonial fut achevé, Cendre pria ses invités de s’asseoir.

- J’imagine que vous avez beaucoup de questions, je me ferai donc un devoir d’y répondre. Vous vous exprimerez chacun à votre tour, selon les directives qui vous ont été transmises à votre arrivée par Monsieur Caron. Je ne tolèrerai aucun chahut.


Il y eut un murmure dans l’assemblée. Jamais la communauté de la Vallée n’avait été invitée à s’exprimer devant un Grand Maître, et encore moins devant le Comte Vladislaus Straud. La sollicitation de la Grande Maîtresse était donc une bonne surprise, mais une surprise de taille.


Tous s’assirent, comme elle le leur avait demandé, mais personne n’osa formuler de question... Pourtant, tous s’inquiétaient pour le devenir de la Vallée maintenant que le Comte n’était plus. Mais qui serait assez fou pour se hasarder à demander des explications à la Grande Maîtresse ?


Cendre comprit immédiatement ce qui se passait et elle s’employa à rassurer son peuple :

- Il n’y aura pas de bonnes et de mauvaises questions, et aucun châtiment à la suite de celles-ci. J’attends de vous de la franchise et je vous répondrai de même. J’attends la première question.


C’était ce qu’elle voulait : dire la vérité à son peuple sur la mort de Vlad, sur l’enterrement de Lucas. Elle souhait qu’il comprenne les raisons de son acte mais aussi qu’ils sachent qu’elle ne les abandonnerait pas.


La première question fut la plus difficile car, c’est de celle-ci que découlèrent toutes les suivantes. Les échanges avec son peuple séduisirent Cendre par leurs sincérités et leurs naturels et elle répondit sans faillir aux foules d’interrogations que chacun se posait, les rassurant chaque fois, mais ne leur cachant pas pour autant que l’ouverture des portes de la Vallée serait retardée, le temps de trouver le Duc Lestat de Riverview.


A l’issue du décorum des Grands Maîtres, Louise, qui s’était occupée d’Alaric puisque Jessie faisait partie des invités, vint chercher Blanche et Clotaire. Il était temps pour eux de dormir un peu.


Cendre désirait rester seule avec ses aînés. Elle les convia à partager un verre de plasmamary afin de faire le bilan de la cérémonie.

- Ça s’est plutôt bien passé, tu ne trouves pas ? Ils t’adorent, Mère ! Je les ai observés un par un ! Ils t’adorent, tous autant qu’ils sont ! lui dit Samuel avec un enthousiasme non dissimulé.


- N’est-ce pas Isaure ? Tu l’as vu comme moi, tu me l’as dit.

- C’est vrai, mais je les ai aussi senti déçus parce leur espoir de voir les portes de la Vallée se rouvrir a fondu comme vampire au soleil.

Cendre avait ressenti la même chose, bien qu’étant certaine que son peuple croyait en elle.


- Ne te tourmente pas ainsi, lui avait-elle dit. Le bilan du Décorum est quand même positif et nous trouverons une solution pour ramener Lucas. As-tu entendu tous ceux qui se sont proposés pour se joindre aux recherches ?


- Bien sûr, mais le retrouveront-ils ? Les recherches n’ont rien donné jusqu’à présent. Le Duc est introuvable. Tu es en train de les nourrir de faux espoirs, Maman.

- L’espoir fait vivre, Isaure..., rétorqua Samuel en regardant Cendre. Tant qu’on leur en donne, Mère sera toujours la plus forte. Elle vient encore de le démontrer en tuant ce vieux Comte.


- Je ne dirai pas cela comme ça mais ton frère n’a pas tort. L’espoir est un moteur, il fait avancer, et, tant que mon peuple sait que je garde cet espoir, il le gardera aussi. Et de l’espoir, j’en ai à revendre !


- Peut-être, reprit Isaure. Ils sont ravis parce qu’ils recherchent un autre Grand Maître qui leur tombe du ciel, mais tu as omis de leur dire que le Duc de Riverview était ton Unique. Pourtant, cela leur aurait permis de comprendre à quel point tu es investie dans ces recherches...


- Je ne leur ai rien dit car ceci est une affaire personnelle. Il serait inconvenable que le peuple soit informé de mes histoires sentimentales ! Nous ne sommes pas dans « Gala », jeune fille !

- Dans quoi ?


- Rien... Oublie ce que je viens de dire... Un truc d’humain... Tu peux comprendre que je n’ai pas envie de voir ma vie privée s’étaler dans toute la communauté vampire, non ?


- Oui, Maman, je comprends. Tu sais, ils sont tous derrière toi. Tu as été grandiose lorsque tu leur as donné la parole. Ils ne s’y attendaient pas ! C’était très bien joué.

- Je confirme, approuva Samuel en avalant une gorgée de plasmamary.

- On retrouvera Lucas, les enfants, j’en suis sûre. Et les portes de la Vallée s’ouvriront.


- Et si on ne le retrouvait jamais ? Que se passerait-il ?



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